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Rendez-vous des P’tits Philosophes du samedi 22 janvier : Le mythe du bateau de Thésée !

Le samedi 22 janvier au matin, les petits philosophes se sont retrouvés à la Maison de la Philo pour réfléchir autour du mythe du bateau de Thésée.

Voici un résumé du mythe :
Thésée fut la vedette de plusieurs aventures spectaculaires, mais cette expérience de pensée ne se réfère qu’indirectement à un de ses exploits : son affrontement contre le minotaure (un monstre composite issu d’amours contre nature de Pasiphaé et d’un taureau — ce monstre fut enfermé dans un labyrinthe construit par Dédale), qu’il a vaincu.
Une fois revenu à Athènes, les citoyens conservèrent le bateau de Thésée pour lui rendre hommage. Ils y apportèrent une telle attention que le bateau garda son allure des débuts, et ce pendant plusieurs siècles : les Athéniens remplaçaient ses parties défectueuses par d’autres, au fur et à mesure que les problèmes apparaissaient. Les Athéniens firent cela jusqu’à obtenir un bateau entièrement fait de pièces neuves.

La question était la suivante : Ce bateau constitué de nouvelles planches, est-ce encore le bateau de Thésée ? Pour répondre à la question, les enfants devaient fournir des arguments censés défendre leur position. Résumons-les dans un tableau ci-dessous :

C’est encore le bateau de ThéséeCe n’est plus le bateau de Thésée
“Même si toutes les planches ont changé, ça reste la forme qu’il a voulu. Il a les mêmes caractéristiques.”
“C’est pas parce qu’on le change que ce n’est plus le sien.”
“Ce n’est pas parce que ce n’est pas lui qui change les planches que ça ne reste à lui. Même si on change les planches, ça reste en sa possession.”
“Les habitants l’ont juste changé pour qu’il reste en bon état. C’est le même, ils ont juste changé les planches.”
“Les habitants ont entièrement reconstruits le bateau donc ce n’est plus le même.”
“Les planches sont magiques et si on les change, elles ne sont plus magiques.”
“Ce n’est pas le même bateau qui a fait tous ces voyages. Par exemple, j’ai perdu mon sac à dos, je ne voulais pas qu’on en rachète un car ce ne serait plus ce même sac.”

Trois problèmes s’offraient donc aux enfants durant la discussion :

  • par rapport à notre propre changement : est-ce qu’on peut être le/la même alors qu’on change ?
  • par rapport à la mémoire des objets  
  • par rapport à la différence entre la forme des choses et la matière de ces choses : est-ce la forme ou la matière qui constituent les choses ou les êtres ?

Cette expérience du bateau de Thésée propose un prolongement. Imaginons qu’on reconstruise un nouveau bateau avec les anciennes planches qu’on avait remplacées. Lequel est le bateau de Thésée : celui qu’on a remplacé avec des nouvelles planches ou celui qu’on a reconstitué avec les anciennes ?

Le bateau remplacé par les nouvelles planchesLe bateau reconstitué avec les anciennes planches
“Celui avec les anciennes planches, c’est celui qui a voyagé. Mais comme il est très vieux, s’il veut voyager à nouveau, il va prendre le nouveau.”
“Il – Thésée- prendrait le nouveau pour conserver l’ancien, comme ça s’il fait de nouvelles aventures, ses anciennes planches seront toujours là.”
“Le nouveau sera successeur des aventures.”
“C’est celui-là qui a voyagé, ce sont ces planches qui ont voyagé.”

“C’est le bateau du passé mais on ne l’oublie pas.”

Les P’tits Philosophes se sont demandés en lien avec le bateau de Thésée, si le passé n’existe plus ou s’il peut encore vivre au présent…

“- Le bateau du passé n’est pas vraiment du passé car ses aventures, il peut se les rappeler, les revivre.”

“- Je ne dirai pas que le bateau appartient au passé car il est encore.”

“- Ta vie d’avant, elle est passée, mais si tu y penses toujours, elle est encore en toi.”

“- Le passé, ça ne veut pas forcément dire que ça n’existe plus. Le passé qu’on a dans notre tête, on l’a dans le présent.”

“C’est du passé mais ça reste, même si c’est du passé.”

La matière semblait compter beaucoup pour définir le bateau de Thésée. Proposons un ultime prolongement du mythe : on change la forme du bateau avec les anciennes planches vs. on garde la forme de l’autre bateau qui a des planches neuves. Qu’est-ce qui compte le plus ? La matière ou la forme ? Lequel est le bateau de Thésée ?

Celui qui est fait avec la matière de l’ancien bateau mais avec une forme différenteCelui qui a la forme mais pas la matière
“Même s’il a changé la forme, ce sont les anciennes planches qui ont voyagé. Donc c’est la matière. Ce sont ces planches qui ont fait toutes ces aventures.”
“S’il avait pris celui avec les nouvelles planches, il n’arriverait pas à les reconnaître.”

“Même si ce ne sont pas les mêmes planches, Thésée pourra revivre des aventures avec ce bateau.”
“Même s’il a la même forme, ce n’est pas le vrai qui a voyagé.”

Il est donc compliqué de définir quelque chose s’il lui manque sa forme ou sa matière. Les enfants ont donc pris connaissance d’Aristote qui s’était notamment confronté à ce problème. Selon le philosophe, un objet se définit par sa matière et par sa forme, comme c’est le cas pour le bateau de Thésée. Mais, Aristote nous dit aussi que ces deux éléments seuls ne suffisent pas. Il faut aussi le but (la finalité, à quoi ça sert) et le moteur (un agent qui agit, dans le cas du bateau, ce sont les habitants). On pourrait donc faire la même chose pour définir l’être humain… Comment savoir quelle est sa forme ? Sa matière ? Son but ? Son moteur ? Allons voir ce qu’en pensent nos P’tits Philosophes :

  • le moteur : “c’est en fonction de ce qu’on agit, ce qu’on se fixe comme objectifs”
  • la forme : “tout n’a pas la forme d’un être humain”
  • la matière : “peau, chaire, os, sang, muscle”
  • le but : “mourir le plus tard possible.” ; “J’ai entendu une interview à la radio. L’acteur, son but dans sa vie, c’était d’être acteur, il a tout fait pour l’être. Parfois, le but de notre vie, c’est le métier, mais parfois, c’est autre chose.” ; “Tout le monde a un but différent.” ; “Notre but serait de vivre en paix.” Pour Aristote, le but commun à tous les êtres humains est le bonheur !

Comme activité de fin, nous avons distribué à chaque petit philosophe une feuille sur laquelle figurait un visage morcelé en pièces de puzzle. Dans chaque pièce, ils devaient y inscrire un élément de leur identité, en utilisant s’ils le souhaitaient, les quatre éléments constitutifs de chaque être selon Aristote (matière, forme, moteur, but). 

En tout cas, nous avons la preuve chaque semaine que chaque enfant est fait de belles idées philosophiques ! Bravo aux P’tits Philosophes !

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Retour sur l’atelier-spectacle du mercredi 22 décembre animé par Maryline Mahuet, créatrice du concept “Histoires en l’air” !

Mercredi 22 décembre 2021, à la Maison de la Philo, vous étiez nombreux.ses, enfants et parents, à assister à un atelier-spectacle philosophique et poétique autour du Philonimo Le papillon de Tchouang-Tseu (Éditions 3oeil) animé par Maryline Mahuet, artiste couturière et conteuse, créatrice du concept Histoires en l’air (www.histoiresenlair.fr).

Nous vous remercions vivement pour ce moment partagé !

Voici en quelques mots et en images une trace de cet atelier.

Après une première lecture, l’histoire du philosophe chinois Tchouang-Tseu prend vie grâce au décor confectionné par Maryline Mahuet à partir de l’univers graphique du Philonimo. Puis ce sont les enfants qui manipulent le décor, donnant ainsi vie, à leur tour, au récit du sage qui, se rêvant papillon dans son sommeil, se demande, à son réveil, s’il est un homme qui vient de rêver qu’il était un papillon ou bien si c’est un papillon qui rêve qu’il est un homme…

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Rendez-vous des P’tits Philosophes du samedi 11 septembre « les mots et les images »

L’animatrice, Anna, raconte aux enfants qu’elle a rapporté un livre trouvé sur un banc, par hasard : Le livre sans images de B.J Novak. « Est-ce que vous pensez que c’est bien un livre sans images ? »

Oui, pensent certains, parce qu’on pourra utiliser notre imagination. D’ailleurs, remarque Marius, parfois on préfère les images qu’on a imaginées à celles qu’on découvre dans un livre. Cela a été son cas avec les livres d’Harry Potter qui n’avaient pas d’images dans leur première édition. D’autres enfants pensent au contraire que les images c’est important pour nous donner des idées sur ce qui est écrit. Et puis, ne risque-t-on pas de s’ennuyer sans les images surtout quand on est petit et qu’on ne sait pas lire ?

Anna remarque qu’au dos du livre il y a une mise en garde : ce livre raconte n’importe quoi et les enfants qui demandent aux adultes de leur lire lui tendent un piège redoutable ! Il est écrit que l’adulte qui lit le livre est obligé de prononcer tous les mots écrits, même les plus absurdes ! « Vous êtes-sûrs de vouloir lire ce livre les enfants ?» C’est un oui enthousiaste et à l’unanimité ! L’animatrice s’exécute, les enfants rient aux éclats.

« Qu’est-ce qui vous fait rire dans ce livre ? » Certains enfants ont aimé à cause des mots rigolos et du fait que l’adulte avait l’air d’un enfant. Mais quelques-uns comme Céleste l’ont trouvé trop bizarre. “Je n’aime pas les choses trop dingos » dit Yelen.

« Est-ce que c’est vraiment un livre sans images ? » La plupart des enfants le pensent : il n’y a que l’écriture et les pages blanches.

Anna passe ensuite au tableau pour proposer aux enfants un petit exercice de distinction entre les concepts.

« Quelle différence entre un mot et une image ? » Par exemple entre le mot chien et l’image d’un chien ?

Yelen : « Un mot c’est un groupes de formes et ces formes elles s’appelles des lettres, alors qu’une image c’est une forme qui a été faite à partir de traits.»

Animatrice : « Mais les lettres, ne sont-elles pas aussi faites de traits ? »

Lina propose une autre distinction : « Les lettres on les dit mais les images on peut les montrer. Par exemple on dit j’ai un chien mais peut-être qu’on n’en a pas en vrai donc il faudrait le montrer. »

Yelen a une objection : « Les mots on peut les dire mais on peut aussi les montrer. Là Anna nous montre le mot « mot » au tableau.»

Animatrice : « Du coup, est-ce que l’étiquette où il y a écrit « mot » on peut dire que c’est l’image du mot « mot » ?

Les enfants concluent que lorsqu’on peut montrer et voir les mots ce sont des images. Mais quand on les entend sans les voir, ce ne sont pas des images.

L’atelier se termine par un dessin : chacun invente un mot et le dessine, ou dessine le mot dans un style qui évoque ce qu’il désigne. Céleste écrit son prénom en faisant les lettres aves des étoiles et des planètes.